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Petites fictions dans ma réalité ... - Page 115

  • La brune, le bleu et le bleu ...

    J’étais parti parce que j’en avais marre .. Pour quoi, pour qui ? Je ne savais pas à vraie dire …

    Je sais simplement que tout mon être réclamait ce qu’il préférait le plus : du soleil et la mer …

    J’ai toujours été attiré par les eaux transparentes et chaudes …Envie de m’y engloutir, version des années deux mille du « grand bleu »…La mer et moi, une vieille complicité ; quand je l’ai vu, j’ai su que ça serait elle, pour la vie …

    Et je m’étais retrouvé là, dans ce coin du monde où tout semble tranquille, prés de la mer, un pays où il semble doux d’y vivre, le soleil donne une note nature aux gens, illusion d’optique , sans doute, on ne voit que ce que l’on a envie de voir … Le soleil doit certes adoucir mais comme partout, quand on a mal, là, au milieu de la poitrine ou dans un coin de sa tête, obsédant, ça reste, ça ne s’enfuit pas …Mon mal être, lui, se sentait mieux ici …

    J’étais arrivé la veille et j’attendais avec impatience (des restes de la civilisation urbanisée ) le bateau qui m’emmènerait de l’autre côté de l’archipel, deux heures de traversée, pour retrouver Jimmy et son bateau qui lui me transporterait au milieu de l’eau, plonger … Enfin …

    Le soleil est doux à cette heure, six heures quinze, je commence fort mon périple « vacancier » mais il est vrai que même le décalage horaire n’a pas eu raison de mon sommeil agité …

    Je suis là nonchalant, en attente …

    Quand j’y réfléchis aujourd’hui, je ne l’avais même pas remarqué, elle, qui aussi, attendait le bateau ; j’étais tellement absorbé, par quoi, d’abord ? Je ne m’en souviens plus …

    Plus tard, j’ai embarqué .

    Plus tard, nous étions au milieu de l’eau, enfin pas si loin de la côte à vraie dire, nous passions au large de plusieurs îles et nous arrêtions à d’autres … Notre bateau, le bus de par ici, prenait à chaque fois davantage de gens qui se saluaient, riaient, s’engueulaient … Un joyeux bordel … 

    Je me laissais bercer par tout ça, le soleil était plus haut et cela était vraiment délicieux, je me sentais presque bien …

    Nous étions dans la dernière partie du périple, beaucoup étaient descendus dans la « cabine » du bateau, cette partie du voyage en mer étant la plus longue … Le bruit des vagues, du vent, la chaleur du soleil et le ciel incroyablement bleu faisaient à cet instant, partis de mon seul univers ; je pouvais me sentir seul au monde, un instant suspendu en harmonie …

    Je ne sais pas ce qui m’a fait tourner la tête mais c’est là que je l’ai vue, là que je la remarquai .. Elle, une brune, pas très grande, enveloppée dans un sarouel et une chemise nouée à sa taille, laissant deviné l’esquisse de son nombril, les cheveux que je devinais très longs, retenus dans une écharpe en chignon défiant toutes les lois de l’apesanteur, les yeux encore cachés derrière des lunettes noires, une peau déjà bronzée ..

    Quelque chose d’indéfinissable me donna l’envie de l’approcher, de lui parler ; le geste qu’elle faisait quand elle remettait sa mèche indisciplinée en place, peut être .. Ca me semblait incroyablement sensuel pour un mouvement somme toute, bien banal …

    - « Bonjour «  murmurai je en l’approchant .

    Pourquoi faut il qu’à ce moment là ma voix me trahisse ? Je tempêtais mais ne laissais rien paraître ..

    - « Bonjour » me répondit elle d’une voix incroyablement basse et légère à la fois .

    Je tombais sous son charme, complètement, à l’instant suivant, celui où elle enlevait ses lunettes. Les yeux noisettes qu’elle posait sur moi me chavirèrent jusqu’au plus profond de mon être … Pas d’autres mots .

    Nous, nous installâmes là, comme ça, l’un à côté de l’autre, face à cette mer intensément bleue, avec un ciel qui se confondait avec elle, caressés par le soleil et le léger vent ...

    Moment de plénitude …

    Il est peut être fou de penser que certaines personnes ont ce don si particulier de vous comprendre d’emblée, ils vous appréhendent comme s’ils faisaient partis de vous et la réciproque est si vraie que les mots deviennent inutiles .

    C’était un de ces moments magiques que l’on voudrait qui dure mille ans ..

    Déjà le joyeux tintamarre des « locaux » comme on les appelait ici, raisonnait à nos oreilles . Nous nous regardâmes . Nous nous sourîmes, complices …

    Nous arrivions à destination .

    Je n’avais même pas imaginé l’instant suivant cependant, là, une sorte de panique m’envahit … Si je ne trouvais pas quelque chose là, à dire, je la perdrai pour toujours ?

    Elle me regarda en souriant, je devinais son regard derrière ses lunettes, ça me transperça le cœur … Elle toucha mon bras :

    - « Toi, aussi, tu vas plonger ? »

    Je me sentis si bêtement heureux à ce instant là que les seuls mots qui franchirent ma bouche furent un « ben, oui » pitoyable .

    - « Jimmy doit me conduire aux deux passes à Havaiki nui «  me dit elle .

    Sacré Jimmy, moi qui pensait être son client préféré comme il se plaisait à me l’expliquer en long et large … Je vais renégocier notre tarif préférentiel  .

    Je connaissais l’endroit pour y être déjà venu, unique, préservé, un lieu qui m’avait semblé adapter et à ce moment, je remerciais je ne sais qui pour m’être trouvé ici et maintenant pour la rencontrer, elle .

    Jimmy nous accueillit avec toute la jovialité dont il était capable, une incroyable exaspération pouvait vous envahir à ce moment là mais c’est le jeu des exubérants et ça passe quoi qu’on dise …

    Nous avions le temps de nous harnacher, nous les chevaliers de l’eau, du silence et de la paix … Mon souffle restait court quand elle enleva ses vêtements et enfila sa combinaison, sa peau était dorée à souhait, son corps laissait deviner qu’elle prenait soin d’elle . Je me sentais encore malhabile avec les mots et ça m’énervait . Moi d’habitude si sûr de moi, enfin, pour l’extérieur . Quelque part, je savais tromper le monde …

    Elle me regardait en souriant et ça s’estompait, je ne savais que lui sourire . Je me sentais bien .

    J’allais avec elle pénétrer le monde que je préférai le plus, j’aurai pu me pincer à ce moment pour savoir si je ne rêvais pas … Qu’elle est la probabilité de rencontrer une femme à l’autre bout de votre univers, qui soit ou qui semble être « elle » ? Qui partage votre passion ?

    Plus rien n’eut d’importance, lorsque je me retrouvais dans cet élément si familier, le spectacle pouvait commencer même si cette plongée n’était pas de tout repos et il s’avéra grandiose, bien en dessus des mots les plus beaux . Les deux passes possèdent leur lot de petits poissons à profusion : demoiselles, papillons, chirurgiens, perroquets, napoléons, ange empereur, bécunes, carangues, tortues, perches, rougets, murènes … Ou encore, des requins à pointe noire, des raies léopard et des raies manta…

    Un enchantement si incroyable que j’en oubliais presque ma compagne qui semblait elle aussi, vivre un moment de plaisir aussi intense que le mien …

    Jimmy était remonté dans le bateau, nous étions là bercés aux crêtes des petites vagues, nous avions déposé nos bouteilles dans le bateau et nous nous apprêtions à remonter lorsqu’elle s’approcha de moi en riant et fit ce geste que tous les enfants connaissent quand ils sont en milieu marin : elle me mit la tête sous l’eau ! Je l’attirais aussi en dessous, nos corps si proches, crièrent tout à coup leur faim de l’autre, ils s’agripèrent et nous remontâmes ainsi collés, nos bouches se cherchant et se découvrant à l’air libre en exquis baisers salés, passionnés…

    Jimmy interrompit la magie de cet instant par un « il faudrait rentrer ! » tonitruant 

    Je l’aidais à remonter dans le bateau, la prenait contre moi, je voulais la garder simplement comme ça sous le soleil, au milieu du bleu transparent de la mer et celui, intense du ciel , nos peaux débarrassées de leurs armures …

  • Chamalows ... Primaire chabadabada ...

    Il est onze heures trente .

    Encore, une demi heure et nous sortirons de notre salle de classe, située au deuxième étage de cette bâtisse centenaire …

    Nous sommes mardi et le mardi à midi et quart, c’est la bibliothèque qui ouvre pour une demie heure . Madame Simon, la maîtresse des CM2, « les grands »,  nous ouvre les portes de son armoire et nous laisse approcher tous les trésors qu’elle contient …

    L’année prochaine, j’aimerai bien être dans sa classe, elle est gentille Madame Simon, toujours à me faire des compliments sur mes nattes et à me dire que ça serait bien de les laisser s’échapper. C’est bizarre les grandes personnes, ça n’est pas facile d’avoir les cheveux dans les yeux quand on fait du vélo , ils ont dû oublier aussi les nœuds ! …

    Enfin ….

    Toute à l’heure, je sais que je prendrai une bibliothèque verte, j’aimerai bien lire une nouvelle histoire des « six compagnons » …Soupir .. Pour l’instant, l’heure de conjugaison se termine et franchement, je n’ai pas le cœur aux temps composés …

    Maman m’a mis un paquet de chamalows dans mon cartable, je n’ai pas intérêt à le montrer, sinon, les rapaces vont tout engloutir en deux de temps . Je l’emmènerai avec moi sur le banc, j’aime bien manger un truc de sucré quand je lis et puis …

    Le mardi, c’est aussi le jour du banc … Et, de ce garçon, Eric, qui me parle quelque fois, pas toujours.  Les garçons, c’est un peu bizarre. Je ne sais jamais pourquoi il ne me parle pas et encore moins, pourquoi, il me parle . C’est à croire qu’il a un jumeau …

    Ca y est, ça sonne enfin !

    Isabelle, ma copine, m’attrape le bras et me demande si je viens à la cantine au premier service ; je lui rappelle qu’on est mardi, que je vais me chercher un livre et de toute façon, à la cantine, le mardi, c’est tout ce que je n’aime pas : soupe de légumes, boudin noir/ purée et les desserts, compote de pommes et fromage blanc … Pire, les garçons vont encore faire des batailles et le directeur va distribuer des punitions … Nan, nan …

    Le deuxième service, c’est plus calme …

    La classe de Madame Simon est au premier, la porte est ouverte ; cette classe est belle, je m’y sens bien . La nôtre est sympa mais elle fait encore pour bébé à sa maman. Je souris à la maîtresse en lui disant bonjour et je vais choisir mon livre, je ramène un « Alice » et par chance, il y a ce que je voulais …

    Je vais aller dans la cour, m’asseoir sur ce banc, à l’abri du châtaigné . Ca sent bon, cet arbre et les feuilles ont toujours de belles couleurs .

    D’ici, je domine la cour et je vois la sortie de la cantine.

    J’aime bien notre cour, elle est grande, bordée d’arbres, d’un côté des châtaignés, de l’autre, des platanes,  elle a de bons coins pour se cacher (mais ça, c’était quand j’étais plus petite) , maintenant, je choisis la corde à sauter ou l’élastique. Mais là, en ce moment, je n’ai pas de chance, c’est la saison des balles , alors, je préfère lire en attendant l’heure de la cantine .

    Ca fait cinq minutes que je suis là quand j’entends le bruit caractéristique annonçant l’arrivée d'Eric : il shoote dans toutes les pierres qu’il rencontre et pourtant, à force, il ne reste pas grand chose de ce côté çi ….

    Mais bon, ça n’est pas grave, je crois que tous les garçons font ça, c’est pour ça que leurs tennis sont toujours abîmées, au bout .C’est plutôt moche mais ce sont les garçons … (haussement d’épaules) …

    -« Slu ! »

    Ca aussi, c’est un truc que je n’aime pas avec les garçons, c’est que tu ne comprends jamais ce qu’ils disent , il faut traduire, toujours …

    -« Bonjour ! » , je ne dis pas « Eric » parce que sinon, il saurait que je connais son prénom.

    - « Tu veux un chamalow ? » et je lui tends le paquet, je me ravise et lui en donne un rose ; Il le prend et le fourre dans sa bouche ; je rougis un peu, j’espère que ça ne se voit pas (marre de rougir comme ça ) : il m’a touché deux doigts !

    - « Tu veux t’asseoir ? », je pose le paquet de chamalows entre nous.

    -« Tu lis quoi ? . Ouais, c’est bien, j’ai toute la collec dans ma chambre » dit il en reprenant un chamalow, il n’a jamais parlé autant et aussi bien !

    Et c’est à ce moment là qu’Isabelle fait son entrée dans la cour avec Florine et Jeanne, elles me regardent bizarrement toutes les trois et se parlent dans l’oreille. Je suis bien obligée d’y aller sinon elles vont me cuisiner.

    Zut et rata zut, qu’est ce qui m’a pris de lui demander de s’asseoir ? Elles ne peuvent pas comprendre qu’il est bien ce garçon, en plus, il aime « les six compagnons » …

    Zut et zut et rata zut !!!!

    Je m’enfuis sans rien dire, juste comme ça, le plantant là sur le banc qui est devenu le sien .

    Est ce qu’il sera là mardi prochain ? …J’ai bien pris le paquet de chamalows ????