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  • En approche d'été...ou presque ...

    Si j’avais pu imaginer, il y a une semaine, que farniente à la plage sous soleil de plomb me donnerait envie de rentrer et retrouver du gris moche teinté de froid, je me serai traitée de fichue timbrée.

    Les mois ternes s’accumulaient depuis, me semblait il, des lustres et mon raz le bol d’autant de noirceur m’avait conduite à un départ précipité, en dernières minutes, pour un choix de séjour au top du soleil, sur l’île de beauté.
    Avec un distinguo pourtant, je villégiaturerai pour une semaine côté plage et pas en haut de ma montagne habituelle, bien à l’abri du touriste déglingué de la réalité se permettant tout et n’importe quoi car loin de son petit chez soi.

    Je voulais cette fois, être écrasée de chaleur, étendue là sur sable brûlant, face à la mer, à ne faire rien d’autre que dorer.
    Ce qui était stupide, lorsque j’y repense maintenant, car avec ma peau soleil tolérance zéro de rousse exacerbée, je ne m’étais jamais aventurée sur une plage à moins qu’il ne soit fort tôt le matin ou tard le soir.
    Comme quoi, le froid et la vie sans éclat conduisent à des coups de tête en digne écervelée.

    J’étais assise au bord du lit, en ce troisième matin, à me demander ce que je pourrai bien faire de moi jusqu’à une heure plus décente pour ma peau afin de satisfaire une soif d’aventure sur la mer, bien installée sur un matelas pneumatique à me laisser dériver.
    J’avais ce besoin inextricable de me sentir partir, lâcher prise complètement et cette idée de me laisser porter par les flots avait un goût d’irrésistible.

    Le soleil titillait déjà allégrement la nature environnante, la laissant craquer après l’exubérante rosée qui l’avait si bien alléchée avec une saveur douce.
    La mer, plus loin, ondulait mollement, ses vaguelettes s’avachissant en plumes poussées délicatement par un souffle léger.
    L’odeur était belle.
    La vue était à couper le souffle.
    Fichtre que c’était bien malgré tout d’être ici!
    Fichtre qu’il aurait été doux de courir nue et cheveux au vent pour communier avec cette magie là…
    Désappointée, je coulais sous la douche en remerciant les fraîches gouttelettes d’apaiser l’impatiente ardeur qui me tenaillait de toute part.
    Le reste de la journée passa vite en fait, m’étant mise en tête de photographier des touristes en bouts afin d’impressionner plus tard sur la toile, une certaine idée de souvenirs de vacances.

    Lorsque le petit vent frais me saisit en faisant tourbillonner le voilage alors que je refermai la porte de ma chambre, je sus que le moment était pour moi, venu.
    Je m’empressais de me glisser dans ma tenue spéciale plage, maillot et chemise en lin, et en deux temps trois mouvements, je posais ravie le matelas sur la mer et le poussais un peu plus loin, m’y allongeant sourire aux lèvres, paix au cœur de pouvoir enfin satisfaire mon envie.
    Je fermai les yeux pour ne plus penser.

    Bien sûr, quand la pluie se fit plus forte et qu’à califourchon sur mon radeau de fortune, j’essayais désespérément de voir à quelle distance je me trouvais de la plage, j’ai trouvé l’idée bien moins agréablement séduisante.
    Les vagues s’en donnaient à cœur joie avec l’imbécile qu’elles avaient là pour lui montrer qu’elles savaient aussi se la jouer sur le mode déchaîné.

    Je dois bien avouer, même si je suis une nageuse émérite, je n’en menais pas large car c’est de celui là, en point perdu dont je ne pouvais maîtriser la notion qui me collait une frousse horrible en goût terrible de désespoir.

    C’est la gorge nouée que je me mis à chanter, quitte à faire dans la stupidité, il fallait y aller carrément et puis, on ne sait jamais un son qui voyage ou qui se répercute quelque part, sur quelque chose, quelqu'un…
    A vrai dire, je n’étais plus en état de penser.

    C’est ainsi qu’il me découvrit : une espèce de folle s’époumonant en massacrant sans vergogne le titre phare de Titanic, accrochée désespérément à son bout de plastique, le regardant fort étonnée avec des yeux immensément ronds.

    Je ne l’avais pas entendu approcher sur son scooter des mers tellement concentrée à ne pas sombrer dans l’eau devenue bien agitée et si noire, ma foi.
    Mon cher matelas ne résista pas davantage.
    Au moment, où j’enjambai et me collai sans aucune pudeur contre ce sauveteur sorti de nulle part, le plastique se dégonfla, ni tenant plus d’autant de courage, et coula en un grand pschitt petit fracas.

    Incroyablement, c’est le moment que choisit la mer pour se laisser caresser par le soleil soudainement réveillé de sa sieste tardive par des nuages taquins, qui la darda promptement de ses rayons délicieusement forts, sachant que c’est ainsi qu’elle tombait en pamoison et cessait toute agitation en illico presto.
    Le temps s’arrêta, l’été reprit ses droits tout de go.
    N’ayant pas eu sans doute mon comptant d’eau ou voulant y mettre une touche plus personnelle peut être, je me mis à sangloter crescendo malgré ce rassurant réconfort retrouvé fortissimo.
    Je me collais davantage.
    Son odeur me rassurait et mes larmes s’en furent ailleurs se promener, glissant sur son dos sur lequel, résolument, je ne voulais que rester.
    Mon sauveur mit alors le contact, poussa sa machine et nous ramena au plus vite et sans effort sur le sable où je m’écroulais les bras en croix et me mis à faire l’ange, histoire d’en rajouter encore, s’il avait eu le moindre doute, quant à ma cervelle grillée et noyée de stupide patentée.
    Je me sentis vraiment pitoyable à moitié ensablée en ne tendant vers lui, qu’un merci et au revoir tandis que tout le reste de moi protestait avec véhémence d’un départ de cet acabit là.
    Je m’enfuyais quasiment pour rejoindre ma chambre sous l’œil effaré du réceptionniste me voyant déposer, en toute impunité, des kilos de sable dont je me délestais sur le carrelage immaculé, dans ma course presque effrénée.

    La porte de la cabine de douche se referma doucement et je ne sentis sur ma peau que la chaleur délicate de l’eau si douce.
    Hum, il sentait si bon…


    J’ai décidément un don pour attirer des filles timbrées!
    Quoique je m’en fichais un peu.

    Je la comprenais en fait.

    Lorsque la mer avait commencé à vouloir se bouger sur un autre mode que belle bleue alanguie, je m’étais dit que c’était l’occasion pour une sensation autre, une de celle qui n’attend pas, vous donnant envie de dompter les éléments pour laisser libre chant à l’adrénaline qui ne demande qu’à se pousser en plus fort, en plus haut.

    J’étais plutôt bien servi à surfer sur les vagues farouchement réveillées avec ce joli puissant joujou que l’on m’avait prêté pour l’occasion et que je n’avais pas pu tester en situation autre que sur mer résolument calme, autant dire, d’un mortel ennui.
    Là, je m’amusais comme un fou et si je n’avais pas coupé le moteur histoire de prendre la mesure des impressions collées en brut, je ne l’aurai jamais entendue.
    Sauver une fille sur mer démontée, ça c’est un truc surprenant de vacances à raconter ou pas, car au bout du compte, en faire état pourquoi ?
    Pas trop mon genre en fait, ça n’intéressait que moi.

    Je la regardai maintenant partir en me souvenant de cette curieuse sensation que j’avais eu quand elle s’était collée contre moi, celle étrange que ça allait de soi avec le désir que ça ne s’arrête pas.
    La vie est mal fichue, pour une fois que j’avais envie de connaître une fille, elle était si sans dessus dessous qu’elle m’avait déjà oublié, en s’éloignant déjà.
    Zut.


    - « Les passagers en direction de Paris sont invités à se présenter à la porte 3 » .

    Au final, ça passe vite une semaine.
    Je m’installe le plus confortablement possible en espérant me coller dans les bras de Morphée jusqu’à mon arrivée à Roissy.
    Je ferme les yeux, accompagné sereinement de Pachelbel.

    -  «  Ah, mon Dieu!
    Quelle maladroite!
    Je suis vraiment navrée!
    Excusez moi!
    Je suis si empotée quelques fois, souvent, en fait.
    Mon sac est fichtrement lourd en plus, vous n’avez pas mal ?
    Je suis désolée, si désolée!
    Oh, c’est vous!
    C‘est enfin vous!!! »

    Ses yeux ne regardent que moi, me voient enfin.
    Et alors qu’elle essaye de ranger son fichu bagage, je me redresse soudain, lui enlève des mains et la prend dans mes bras pour ce baiser que j’aurai déjà dû lui donner l’autre fois.
    Il sent toujours bon.
    Et fichtre que ces lèvres sont délicieusement douces.



    -  «Que veux tu ?
    -  Juste toi. »


  • Le jour où le fil sauva le lavabo...

    Je passais mon temps à espérer.
    Espérer que le hasard me bénisse de ces moments précieux qui font basculer les ténèbres en univers radieux.

    Je la croisais quelques fois.
    Forcément!
    Elle était ma voisine de cette rue calme d’une banlieue tranquille, en maisons et jardins protégés où j’avais emménagé un beau matin de mai.
    Un lieu privilégié, certes, qui me permettait le calme nécessaire dont j’avais besoin pour composer.
    Elle habitait la maison d’en face.
    Je la voyais entrer et sortir en vélo, passant le lourd portail qui cachait à la rue, sa maison d’un autre temps au creux d’un grand jardin de curé.

    Il arrivait aussi que la boulangère soit témoin de notre rencontre, pour moi opportune, en son magasin ; je l’observais alors à la dérobée m’imprégnant de son parfum, me gavant de ces petits gestes qu’elle avait en me donnant un souriant bonjour étincelant.
    Je restais là, étourdi par le virevolté de sa robe l’éloignant déjà alors qu’elle semblait plus danser que marcher, somptueusement simple et radieuse.
    Je repartais parfois, les bras chargés de viennoiseries, de pâtisseries, de pains de toutes sortes pour le plus grand plaisir de la boulangère ravie du changement de mon achat quotidien de l’indispensable baguette.
    Les canards du lac supérieur appréciaient eux aussi d’ailleurs cette inopinée bombance.

    Comment faire ?

    Je brûlais d’envie de lui tenir un discours insensé de flamme déclarée mais, je n’avais jamais su faire cela.
    La musique était ma seule compagne.
    Les mots à partager me fuyaient et me laissaient sans voix quand une ébauche d’échanges se présentait en impromptue, surfant sur un panaché de météo capricieuse associée à la tombola organisée pour les œuvres de je ne sais quoi ou encore, du chat perdu de la petite Katherina, totalement inconnue pour moi.
    Elle devait me croire ours complètement désintéressé par un comportement aimable en société.
    Je me désespérais d’autant de peu de civilisé.

    Alors, je composais des musiques que je jouais en fort afin que les notes lui parviennent en passant par-dessus le lourd portail, de celles là qui la berceraient de ces sentiments doux et tumultueux qui me submergeaient tant.

    Je ne voyais qu’elle et je pensais bien, qu’elle ne me remarquait même pas.

    Le temps passa ainsi, saison après saison, sans que rien ne changea d’un iota, pour mon plus grand désarroi.

    Un jour pourtant, treize mois après mon emménagement, il y eut le facteur pour une fois judicieux qui, en se trompant de boite aux lettres, me permit l’improbable.

    Le cœur battant, l’émotion fichée dans le creux de l’estomac, je traversai la rue qui me séparait de ce moment que j’imaginais déjà, espéré moult fois avec la lettre égarée bien serrée entre mes doigts.

    -  «  Prenez vous du sucre dans votre café ? » me lança-t-elle sur ce ton enjoué que j’affectionnais dès lors, du fond de la cuisine où je la rejoignis sans tarder.
    - «  Je ne vous remercierai jamais assez de m’avoir aidée pour ce fichu robinet dans le jardin. C’est vraiment un coup de chance que vous ayez sonné à ce moment là où il a explosé. On peut dire ça d’un robinet ? » rajouta t elle la voix rieuse.

    Ce qu’elle oublia de préciser, c’est que la lettre que j’avais apportée, se noya littéralement sans jamais délivrer ce pour quoi elle avait été créée.

    Et ce qu’elle ne sut surtout pas, ce fut que je me sentis mal comme jamais, trempé dans sa cuisine à essayer de me sécher avec la serviette qu’elle m’avait donnée plus tôt.
    Une envie inébranlable de la prendre dans mes bras et de l’embrasser me préoccupaient outre mesure autant que celle de me débarrasser de toute cette eau qui m’inondait et allait me faire déborder éhontément hors de moi.
    Je souris en regardant le lavabo comprenant tout à coup, ce qu’un horizon bouché peut avoir de lourd en peine frustrée.



    - «  Tu sais, je ne te l’ai jamais dit, mon amour, mais j’étais fichtrement embarrassée le jour où tu es venu chez moi, pour la première fois.
    Lorsque nous étions dans la cuisine.
    Je préparai le café en essayant de calmer les battements de mon cœur, en me demandant si je pouvais contenir toute ces émotions qui me traversaient .
    J’avais tellement envie que tu me prennes dans tes bras et j’en avais si peur aussi.
    Tu aurais alors découvert ce que tu sais aujourd’hui, que j’aime être nue sous ma robe quand je suis chez moi.
    Qu’aurais tu pensé de moi?
    Moi qui espérais depuis tout ce temps, en collégienne, que tu m’adresses la parole, je redoutais que ma nudité découverte te laisse imaginer une légèreté qui ne me sied pas.
    J’étais presque soulagée que ce fichu téléphone sonne et que cet appel important te reconduise à la porte de chez moi!
    Avec la peur au ventre, pourtant, que tu ne reviennes jamais! ….» …

    Et avant qu’elle n’en dise davantage, je capture sa bouche pour ce baiser délicieux qui est le notre, celui que j’ai découvert lorsque je suis revenu un peu plus tard, sec et soulagé de mon excédent d’eau, chercher mes lunettes oubliées près du sucrier.
    Moi, aussi mon amour, j’ai trouvé ce coup de fil salvateur, cependant, je ne te dirai pas pourquoi.
    Je préfère me souvenir, le lavabo aussi peut être, de tes fesses qui s’y posent subrepticement, de tes jambes qui m’enserrent doucement lorsque tu sautes dans mes bras. Fichtre oui, je préfère cela!

    Hum, tant que j’y pense, ne dit on pas « évier » pour cet élément de la cuisine?…



    -  « Que veux tu?
    -  Juste toi. »