Une fois ne sera pas coutume, je serai déraisonnable.
Une envie de boutons nacrés en tout petits comme ceux qui ornent en fermeture cette robe de satin rouge qui m’a faite sentir le plaisir qu’auraient vos mains à les déboutonner, laissant ma peau se dévoiler si doucement que la fièvre d’une lenteur orchestrée me laisserait sans nul doute en grande confusion de sens.
Le miroir me disait que cette robe avait cette magie toute particulière d’entraîner les amants dans leur monde de volupté.
Qu’il en soit donc ainsi.
Me glisser alors dans ce long fourreau étrangement sensuel sera ce soir la plus compliquée des missions vestimentaires qu’il m’ait été donnée : le satin prés de la peau scellé au plus prêt grâce à cette rangée de petits boutons nacrés si disciplinée partant de la nuque jusqu’au plus bas des reins n’étant certes pas, la manière la plus simple de se vêtir.
Mais sera t elle vraiment la plus simple à maîtriser ?
Car après tout, l’émoi versé dans mon corps à imaginer vos mains pourraient m’entraîner sur des chemins de traverse jusque là, interdits .
Un frisson parcoura ma peau comme une légère brise d’été au sortir du creux des vagues sait si bien le faire.
L’on soulignera évidemment l’importance de se préparer en toute quiétude à l’entrée dans les bras d’un amant même si l’on connaît, par intuition, la toute perfection voluptueuse des étreintes.
Je jetais un regard dans le miroir à cette nunuche là qui me surprend toujours quand elle la joue grand apparat.
Cependant, il fallait au moins cela pour des retrouvailles en forme de premier rendez vous après l’épisode douloureux de la « blonde » , des retrouvailles avec la vie sous la forme d’acceptation de dîner avec cette homme que je côtoyais souvent à la maison d’édition, qui a le pouvoir, le don de jeter le trouble un tantinet en beaucoup, à chacune de nos rencontres.
Et fichtre que je pensais tout cela impossible, il n’y a pas encore si longtemps !
Mon amie qui m’avait aidée à finaliser l’installation de ce petit bijou, qui m’hébergeait maintenant depuis de longues semaines, me regarda tout sourire en me souhaitant une jolie soirée et referma la porte de l’entrée sur moi, me livrant à ce palier devenu tout à coup « le » monde hostile des doutes.
Mais qu’étais je en train de faire ?
Enfin, nan, pas encore .
J’étais juste là dehors, en route pour…
Vertiges.
Mal au cœur.
Nœud au ventre.
Je n’avais qu’une envie là, maintenant, c’était de tambouriner à la porte et de rentrer dans mon cocon.
Et puis, mon imagination me laissant voir mon amie l’œil collé au judas, attendant ces gestes là et me sermonnant à tout va en ouvrant la porte violemment, eurent raison de moi.
J’avais dit oui parce que j’étais prête.
Je pris l’ascenseur et entra dans le taxi qui m’attendait au sortir de l’immeuble.
Il y a des moments où le temps s’arrête.
Celui où il posa ses yeux dans les miens, à mon entrée dans ce restaurant, en fut un .
Celui où il posa sa main au creux de mes reins, un autre.
Celui où il posa le trouble dans mon esprit avec le parfum de son corps, un troisième.
Celui où il posa le son de sa voix jusqu’au plus profond de moi, un quatrième…
Lorsque je repense à cette soirée, c’est fou au final le nombre d’instants suspendus, comme si l’on souhaitait insidieusement me faire mettre le doigt sur le caractère exceptionnel de ces heures et faire remarquer réellement à chaque parcelle de ma petite personne que je ne devais pas les prendre à la légère.
Lorsque plus tard, bien plus tard, sous couvert de feu de cheminée et de bougies allumées, son souffle glissa au creux de mon cou après le plus suave des baisers de la nuit naissante et que sa main entreprit de défaire en toute délicatesse ces petits boutons si patiemment fermés, je me dis avant de plonger dans la plus douce des exaspérations contre la lenteur exacerbée de cette action menée avec la plus grande des dextérités, qu’il n’y avait pas de hasard : la robe n’avait été faite que juste pour ces mains là…
Le dernier bouton succomba et je fis de même.